27.10.09

Fêter tous les Saints...

Héritiers et bâtisseurs…

A la fin de la Bible, un texte mystérieux vient clore le Nouveau Testament : l’Apocalypse dont l’Eglise nous invite à lire un extrait en ce jour de Toussaint. Le mot « apocalypse » a pris dans le langage moderne un sens péjoratif : l’apocalypse, c’est un peu « la fin du monde ! Sous la plume de Jean, le mot a un tout autre sens : certes, il est question de la « fin des temps », mais non pas annoncée comme une catastrophe, mais comme une bonne nouvelle ! L’apocalypse nous « dévoile », nous « révèle » - c’est le sens étymologique du mot – au travers d’une sorte de long poème, ce qu’est le Salut et comment il est à l’œuvre dans l’Histoire. La scène qui nous est décrite aujourd’hui est impressionnante : on y voit l’immense cortège des « élus », une foule innombrable venue de tous les horizons. C’est le peuple de croyants marchant, à travers le temps et l’histoire, vers la joie éternelle ; c’est ce peuple de saints, connus ou anonymes, dont l’Eglise nous invite à faire mémoire aujourd’hui.
Dans la ferveur de cette fête – qui n’est pas triste commémoration des morts mais réjouissance pour les « vivants en Dieu» - , nous pouvons prendre conscience a quel point nous sommes les héritiers de toutes ces femmes, de tous ces hommes qui, depuis l’aube du christianisme, ont choisi de laisser la frêle lueur de la foi éclairer leur vie.
Oui, la foi chrétienne est beau passage de relais : voici que, de main à main, de cœur à cœur, nous nous transmettons, tant bien que mal, de génération en génération, la grande nouvelle des Béatitudes. Célébrer la Toussaint, c’est donc se savoir héritiers de la foi de nos prédécesseurs : c’est aussi – fort de cet héritage - se faire bâtisseurs de l’avenir…

20.10.09

Méditer l'évangile du dimanche 18 octobre 2009

29ème dimanche du temps ordinaire (B)

Non violence



Jacques et Jean ne manquent pas de culot ! Les voilà qui réclament les meilleures places au paradis… Manque flagrant d’humilité ? Rien n’est moins sûr : en fait, ils ont peurs. Sur le chemins qui les mènent à Jérusalem, Jésus leur a annoncé sa passion. Ils sont scandalisés et cherchent à se rassurer : s’il faut aller jusqu’à la tragédie qu’au moins ce soit pour partager ensuite le Royaume !
Leur question maladroite traduit le malaise de l’ensemble des disciples, et sans doute le nôtre également, encore aujourd’hui. Pourquoi faut-il donc que le propre fils de Dieu meurt ? Pourquoi faut-il donc qu’il se mette à genoux et lave les pieds de ses disciples, comme un esclave ? C’est le monde à l’envers !
Lorsque les prophètes annonçaient la venue du « Fils de l’homme », n’évoquaient-ils pas un roi puissant ? C’est à ne rien y comprendre : voici que le Messie tant attendu se présente comme un être fragile, bientôt terrassé par le tribunal des hommes…
Avouons-le, cette histoire de sang versé en « rançon pour la multitude » nous choque … Mais gare au contresens ! Le mot « rançon » évoque pour nous la somme exigée par des ravisseurs contre la libération de leur otage. Dans notre passage, le mot « rançon » a un tout autre sens. Il est dérivé d’un verbe qui signifie « délier », « détacher »… Jésus ne verse donc pas son sang pour apaiser la prétendue colère de Dieu contre l’humanité. Non, le Père n’exige nullement le sacrifice de son Fils !
Ce qu’il espère, c’est que nous entendions enfin la parole d’amour du Christ, que nous découvrions enfin que la seule libération possible passe, non par la violence, mais par l’agenouillement devant l’homme…

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7.10.09

Vers qui va l'Eglise ?

Dans le livre dense et prophétique qu’il publie ("J'aimerai vous dire" Entretiens avec Dennis Gira. Editions Bayard), Albert Rouet pose la question : « Vers qui va l’Eglise ? » L’archevêque de Poitiers trempe sa plume dans une solide espérance ou se mêle une once d’inquiétude.
De fait, le constat est rude : alors qu’il connaît une certaine vitalité sous d’autres latitudes, le catholicisme affronte, dans notre monde occidental, une crise sans précédant. On peut, hélas, aligner les statistiques en bernes (pratique, ordination, catéchisation…) mais le plus grave n’est pas là. En dépit d’une timide et ambivalente vague d’intérêt pour le « spirituel », notre monde industrialisé semble inexorablement entraîné vers une indifférence religieuse de masse.
L’homme « moderne » occidental semble désormais pouvoir passer une bonne part de sa vie à ne tout simplement pas se poser la question de Dieu ! Et il ne s’agit pas là de théorie : nous avons toutes et tous, dans notre entourage, des enfants, petits-enfants, amis, collègues pour qui la foi n’a même plus rang de simple hypothèse !
Dépositaire du trésor de l’Evangile, l’Eglise a de bonnes raisons de s’inquiéter : comment « dire Dieu » à un monde qui n’a – apparemment – plus soif de transcendance ? Rude défi !
Avec courage, elle cherche sa voie, entre défiance et confiance à l’égard d’une modernité qu’elle a de plus en plus de mal à comprendre. La tentation est forte de se laisser aller à l’angoisse, de se raidir, de condamner un monde « sans Dieu », de se replier dans une contre-culture catholique intransigeante.
Compréhensible, cette voie est pourtant sans issue.
L’Eglise n’a pas d’autre chemin que celui du monde. « La spécificité chrétienne consiste à mêler notre langage au langage des autres et à se positionner, non pas en concurrence, mais en dialogue avec le monde » écrit Albert Rouet.
On peut certes continuer de se lamenter en comptant les chaises vides de nos paroisses, bâtir des stratégies pour regonfler les rangs, tenter de doper le recrutement des séminaires, chercher à être « moderne » ou au contraire faire appel aux « modèles de toujours » en soufflant sur les braises de la nostalgie.
On peut débattre à l’infini sur le sens de sacré, recadrer les normes liturgiques, inviter à communier debout, à genoux, dans les mains ou dans la bouche, célébrer en français ou en latin, en aube ou en chasuble… On peut continuer de s’agiter autours de toutes ces questions qui ne sont pas toutes inintéressantes : l’urgence n’est pas là !
Plus que jamais, il nous faut être une Eglise « hors les murs », une Eglise qui se risque aux « frontières », une Eglise « bilingue » qui ose parler la langue et la culture des hommes et des femmes d’aujourd’hui. Une Eglise fraternelle qui ose venir s’asseoir, « en terre étrangère », au bord du puits pour écouter les soifs, les cris, les questions, les douleurs, les secrètes espérances des hommes et des femmes de ce temps.
L’Eglise est ainsi faite qu’elle n’est vraiment elle-même qu’en dehors de chez elle ! L’Eglise est fille de l’exode, sans cesse remise au monde par un Christ éternellement pèlerin, toujours en marche vers l’ autre, le différent, et d’abord le pauvre, le malade, le fragile…Oui, l’urgence est de remettre l’Eglise au monde !